GRÉCO, la vie d'une Jolie Môme

Les Arts Liants (Avignon 2024)

Dans le respect des mots de Gréco, Dominique Bethune a donné la mesure de son talent d’artiste polygame. Remarquable interprète aux services d’Auteurs difficilement qualifiables autrement que par leur génie, Dominique Bethune a offert sa voix à leurs textes et, bien au delà de l’expression des mots, elle est allée, avec son corps, cueillir des pans de vie de la Gréco. De l’évocation de son enfance fracassée par le poids de ses origines - sa soeur et sa mère ont été déportées après avoir été tout comme elle arrêtées et torturées - à celle de ses premiers pas dans la chanson, Dominique Bethune adopte la fragile force, la sensibilité extrême de la chanteuse de Saint-Germain-des Prés. A ses débuts, elle choisit ses auteurs, puis très vite sera choisie par eux, car tout dans la Gréco est à la hauteur de leurs écritures. Vian, Sartre, Gainsbourg… leurs textes sont des prétextes à incarner, à interpréter. Plus que la mythique Piaf, Juliette Gréco a la puissance scénique de Brel, de Bécaud et de Barbara. Dominique Bethune crame la scène. Elle happe nos regards rivés sur l’expressivité de son visage, elle les fixe sur son corps qui parfois seulement se réunit concentré en ses mains. Le geste à peine esquissé a déjà frôlé notre cerveau et nos pupilles attendent le prochain. Elle, comme les interprètes précédemment cités, est capable de nous faire ressentir physiquement ce qu’elle incarne. Mais de qui donc est-il question? Juliette ou Dominique ? Le miroir de la coiffeuse au centre de la scène ne parle pas. Quand elle s’y assied pour endosser son rôle en coiffant la perruque brune de ses mains un peu émues, légèrement tremblantes, comment ne pas penser à son grand amour Miles Davis ? Dos au public, il savait extirper par ses notes, de nos âmes des émotions jusque là inconnues. Alchimie de l’interprétation, elle fait vibrer celui qui la reçoit. Plutôt que de distiller le superbe répertoire de Juliette Gréco, Alain Illel a préféré jalonner son itinéraire de quelques unes de ses chansons. Le sujet de la pièce c’est Elle, en construisant autour des rencontres marquantes, le personnage d’une chanteuse imprégnée par son époque, forte dans sa liberté, fragile dans sa sensibilité d’artiste, il a réussi à mettre en scène hors du champ muet du miroir, Dominique Bethune. Lorsqu’elle raconte l’arrestation par la Gestapo, elle suggère l’intensité de la violence par le geste saccadé des mains projetées dans son dos et menottées. C’est une comédienne, ses gestes sont pensés et réalisés. Quand elle annonce l’emprisonnement, elle choit violemment, sa chute est signifiante d’une projection intentionnelle, c’est une danseuse, ses mouvements sont écriture, traduction. Quand elle cesse la narration pour se diriger vers l’emplacement du micro, ses pas sont ceux de sa voix, posés, graves, elle est chanteuse. Dans cette réunion de trois talents, ce qu’on retiendra, c’est l’harmonie dans la conjugaison, le don et le travail de l’artiste. La comédienne sait jouer des retenues, des hésitations dans la justesse, la mesure. La voix est dessinée, contenue, sans vibrato, comme l’est son corps dans le simple fourreau noir qui le souligne. Le maintien dans les déplacements comme ses pas dépassent l’élégance ; ils semblent provenir d’une grâce innée qui elle n’est pas interprétée. A n’en pas douter, il va falloir réserver dès l’ouverture des billetteries pour ne pas se trouver sur une liste d’attente en juillet. Nadine Eid Avec Dominique Bethune Mise en scène Alain Illel Sonorisateur Tchiné Perrin

RegArts (Avignon 2024)

Un beau portrait de Juliette Gréco, tout en sensibilité et nuances. Juliette était une danseuse avant d’être une chanteuse et de devenir la muse de Saint-Germain des Prés. Amie de Sartre et de Beauvoir, de Boris Vian, Miles Davis, Gainsbourg, Léo Ferré, Brassens... Brel dont elle a chanté quelques chansons, creusant le sillon de la poésie d’après-guerre. Elle a mené une carrière magistrale de ses début en 1950 à sa mort. De sa voix grave, elle a porté bien des poèmes, de son corps dans une robe fourreau elle a sublimé bien des textes. Juliette Gréco était plus qu’une chanteuse, un mythe qui avait à la bouche les meilleures chansons françaises. Dominique Béthune reprend le personnage, elle investit la femme, dans une robe moulante noire, elle se coiffe d’une perruque pour avoir l’allure de Gréco et avec la grâce d’une danseuse, elle incarne sans fausse note cette dame de la chanson qui mena une si belle carrière. On ressent derrière Dominique la ballerine qu’elle fut, ce qui lui donne une légèreté aérienne dans ses déplacements et beaucoup de grâce dans ses mouvements. La mise en scène d’Alain Illel retrace la vie de la chanteuse avec beaucoup de délicatesse et de charme. Beau moment dans le cocon de l’Optimist où Dominique a pu donner le meilleur d’elle- même face à une salle pleine et conquise. On est donc parti en arrière, au temps de l’occupation quand Juliette, pas encore chanteuse, fut arrêtée par les Allemands, la vision de ses mains dans son dos est glaçante... puis ce sera Saint-Germain des Prés où peu à peu elle deviendra l’icône du lieu. Ses amitiés, ses amours parfois sans lendemain comme avec Miles Davis, idylle trop précoce à cette époque entre une blanche et un noir. Évocation d’une chanteuse avec beaucoup de sensibilité, on n’est pas dans la copie, on est dans le récit imagé, on reçoit avec beaucoup de plaisir cette remémoration. Le temps d’un spectacle nous fûmes transportés avec un bonheur fou. Gageons que cet été cette pièce va rencontrer un beau succès. Jean-Michel Gautier Gréco, la vie d'une jolie môme Avec Dominique Béthune Mise en scène Alain Illel Sonorisateur Tchiné Perrin

Théâtrothèque (Avignon 2024)

Le spectacle est une invitation intimiste dans la vie de Juliette Gréco. On apprend que Juliette est danseuse avant d'être chanteuse et comédienne. Elle chante surtout à St Germain des Prés. C'est une muse entourée de Sartre, Simone de Beauvoir, Vian, Prévert, Piccoli, Mile Davis, Gainsbourg, Et ........Belphégor, vous vous souvenez ? Notre comédienne n'essaie pas de ressembler à Juliette même si elle porte une robe noire moulant, et une perruque à la Gréco, non elle est un "porte-parole" qui nous offre les moments les plus difficiles et les plus prestigieux de l'artiste. La danse bien sûr est là et la mise en scène est efficace. La comédienne est belle, talentueuse, et sensible. Un chouette moment. Geneviève Brissot