- Paris, 75014
- Du 28/03/2023 au 08/04/2023
- Durée : 1h00
- Tout public
- À partir de 0 €
Découvrir le spectacle
Sur les ruines d’un amour qui fait écho au ressenti de l’exil, elle fait sienne la chanson Al Atlal d’Oum Kalthoum inspirée du poème d’Ibrahim Nagi.
Norah Krief a souffert de sa différence aux yeux des autres, encombrée par le lointain pays qui entretenait la nostalgie de sa mère, alors qu’elle-même aspirait ardemment à la conformité. Aujourd’hui apaisée, affrontant ses émotions contradictoires, l’artiste va à la rencontre de l’héritage refoulé, et en célèbre les souvenirs visuels, sensuels, ou sonores, accompagnée par trois musiciens.
Note d'intention
À l'amour, aux pays, aux regrets, aux ruines de la vie!
Quand Wajdi Mouawad m'a proposé de chanter un extrait d’Al Atlal, ce long poème d'Ibrahim Nagi interprété par Oum Kalsoum, c’était en janvier 2016 dans la pièce Phèdre(s) mise en scène par Krzysztof Warlikowski.
En écoutant cette chanson, j'ai eu une montée de nostalgie.
Je revoyais ma mère concasser au mortier son café, le moudre fin comme de la farine me disait-elle, le mettre dans sa zazoua sur le feu doux du kanoun, ajouter une goutte d’eau de fleur d’oranger, tout ça dans notre jardin de banlieue parisienne. Elle restait concentrée, surveillant avec vigilance le frémissement du café qui dégageait une arôme de noisette grillée. Et c’était long, ça bouillait lentement, elle retirait, et remettait la zazoua sur le feu tout en écoutant Oum Kalsoum sur le tourne-disque de la maison.
J'étais trop jeune pour comprendre ce que représentait ce moment qui s’étirait dans l’après-midi, et ce besoin essentiel qu'elle avait de passer quelques heures avec Oum Kalsoum. L'amour perdu, le regret, le pays, ces mélodies orientales, cela ne me parlait pas.
Cette langue, l’arabe, diffusée à plein volume dans le jardin, m’agressait, je ne la comprenais pas et la rejetais.
Je pense que j'avais honte au plus profond de moi, je cherchais plutôt comment m'intégrer à l'école, et surtout comment faire avec le regard des voisins, ça c'était fondamental.
Aujourd’hui j’ai besoin de chanter ce poème en entier, de retrouver la langue arabe et je décide d’en faire un temps de représentation, de concert, de théâtre musical.
Je ne parviens pas à t’oublier toi qui m’avais séduite par tes discours si doux et raffinés...
Mais où est donc passé cet éclat dans tes yeux...
Mon désir de toi me brûle l’âme, et le temps de ton absence
n’est que braises cuisantes...
Rends-moi ma liberté et brise mes chaînes, je t’ai tout donné et il ne me reste plus rien...
Le poème est écrit au présent, son adresse est directe, active et revendique la liberté avec exigence. En 1960, Oum Kalsoum chante devant le peuple égyptien et devant tout le Moyen-Orient en invitant les femmes à ôter leur voile. Ma mère était juive et n’en portait pas, mais vivait au quotidien avec une grande liberté.
Et c’est maintenant que la voix inouïe d'Oum Kalsoum et ses modulations orientales me fascinent, ainsi que sa façon d'instaurer un rituel avec le public, d’être dans une interaction constante avec lui. Ses improvisations mélodiques et sa joie à chanter la nostalgie participent de ma nécessité à construire cette proposition personnelle.
Al Atlal signifie Les Ruines. Il raconte les vestiges d'un amour et le rêve d'un pays perdu. Il résonne en moi, et je demande à l’écrivain et dramaturge Wajdi Mouawad d’échanger et mettre en dialogue avec ce poème, avec ce chant une dramaturgie qui comprendrait des lettres adressées à ma mère, des témoignages de personnes qui ont vécu l’exil.
Je commencerai à chanter Al Atlal pour ces témoins, grâce à eux.
Je chanterai le pays perdu, les parents disparus, le plaisir et besoin de faire ressurgir ces souvenirs, ces odeurs sensuelles et érotiques.
On pourrait servir le café de ma mère, du thé à la menthe...
Depuis des années, je travaille avec Frédéric Fresson, pianiste et compositeur (avec qui nous avons créé notamment le spectacle Les Sonnets de Shakespeare). C’est à lui que je confierai la direction musicale. La musique de ce poème sera interprétée par un trio de musiciens multiinstrumentistes. Ces musiciens nous guident : Mohanad Aljaramani, percussionniste et oudiste formé à la musique orientale et classique au conservatoire de Damas et Lucien Zerrad, musicien et producteur aimant croiser les musiques du monde. Des artistes avec lesquels échanger partager et inventer un terrain de jeu singulier.
Distribution
Frédéric Fresson, Antonin Fresson, Hareth Mhedi et Norah Krief
Équipe artistique
Auteur(s)
Frédéric Fresson et Norah KriefMetteur(s) en scène
Norah Krief
Théâtre 14
Nous avons maintenant une histoire… Une grande joie nous parcourt au moment d’ouvrir ce programme de notre troisième saison, après cette expérience heureuse et merveilleuse d’avoir vu se dérouler de septembre à juin, sans annulation ni report, une saison entière avec notre nouveau costume de directeurs du Théâtre 14.
20 Avenue Marc Sangnier
75014 Paris